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Semences paysannes : vente interdite ou autorisée ?

Semences paysannes : vente interdite ou autorisée ?

Pour rappel, et pour simplifier, les semences dites « paysannes », anciennes et reproductibles, résultent de la récupération de graines d’une récolte précédente. Elles sont prélevées pour être semées plus tard. Elles sont donc issues d’un cycle local, de la graine à la graine, et ne font pas l’objet d’un approvisionnement auprès d’un semencier. Par extension, la désignation de semence paysanne peut aussi s’appliquer au prélèvement et à la multiplication de bulbes, stolons, rhizomes et boutures. La commercialisation de ce type de semence à été interdite en 1932 puis de nouveau autorisée en 2020. Mais pourquoi ?

1932 : création d’un catalogue officiel dont sont exclues les semences paysannes

À l’époque, les cultivateurs avaient besoin de garanties pour leurs futures récoltes et de fiabilité pour leurs semences. En effet, la consommation était croissante et la production agricole commençait à s’intensifier. Il ne s’agissait donc plus de se contenter de simples promesses de rendement et de résistance à la maladie. Les enjeux étaient économiques et sociétaux.

Pour rassurer les agriculteurs et les acteurs économiques, le ministère de l’Agriculture a donc créé le Catalogue officiel des espèces et variétés des plantes cultivées. Ce document officiel répertorie toutes les semences jugées fiables et commercialisables en France en 1932. En d’autres termes, à partir de 1932, chaque semence devait obligatoirement être inscrite à ce Catalogue officiel pour être commercialisée.

Afin d’y figurer, chaque semence est alors contrôlée et testée pour définir précisément ses caractéristiques. L’objectif étant d’avoir des résultats objectivés, quantifiables et comparables pour choisir les variétés éligibles à la commercialisation.

C’est toujours le cas aujourd’hui, puisque chaque semence inscrite au Catalogue bénéficie d’une attestation officielle qui prouve que ses caractéristiques techniques et agronomiques ont été contrôlées et approuvées par le GEVES

Pourquoi les semences paysannes ne figurent-elles pas dans ce catalogue officiel ?

C’est le Comité technique permanent de la sélection qui détermine quelle semence est inscrite ou radiée du catalogue. Ce comité se compose de semenciers, chercheurs, industriels, distributeurs et agriculteurs multiplicateurs.

Au début des années 30, les critères de sélection des semences du Catalogue officiel étaient essentiellement basés sur une optimisation de la production agricole à grande échelle pour favoriser une consommation croissante. Les semences paysannes ont donc été écartées car considérées comme trop instables et ne correspondant pas aux critères recherchés.

Ce sont donc majoritairement les semences des grands groupes internationaux qui furent répertoriées au Catalogue officiel des espèces et variétés commercialisables. Elles étaient déjà jugées plus fiables et plus rentables.

Ces grands semenciers avaient également, et ont toujours, la trésorerie suffisante pour régler le montant des droits applicables aux examens d’inscription au Catalogue officiel. (Cf Barème 2022 CTPS

Aujourd’hui encore, chaque variété doit prouver sa Valeur Agronomique (rendement), Technologique et Environnementale (VATE) et respecter les normes DHS. DHS signifiant Distinction (la semence se distingue des autres variétés déjà existantes), Homogénéité (résultat homogène, plantes semblables) et Stabilité (même après plusieurs cycles de production).

Juin 2020 : une vente autorisée aux jardiniers amateurs

Le règne végétal - Auteur : Barral, Jean-Augustin (1819-1884). Dupuis, Aristide (1823-1883) Date d'édition : 1864-1869

Depuis juin 2020, la vente de semences paysannes est de nouveau autorisée en France. Elle reste néanmoins limitée à la vente aux jardiniers amateurs et aux collectivités et les semences paysannes ne figurent toujours pas dans le Catalogue officiel. C’est-à-dire qu’il n’y a toujours pas la possibilité d’en faire une exploitation commerciale.

La vente autorisée aux particuliers répond à la demande croissante des consommateurs et des jardiniers de préserver les variétés anciennes et reproductibles.

En effet, au fil des décennies, la sélection de certaines variétés plutôt que d’autres a entraîné une sorte d’uniformisation des cultures et un appauvrissement de la biodiversité. De fait, les semences les plus adaptées à la production de masse se sont développées, notamment les hybrides F1, alors que certaines variétés plus anciennes et locales ont presque disparu de nos campagnes.

En autorisant de nouveau la vente de semences paysannes aux particuliers, le ministère français de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire donne un nouvel élan à des variétés qui pourront de nouveau pousser dans votre jardin potager. Profitez-en pour redécouvrir des variétés anciennes et originaires de votre région !